Au Togo sa terre natale, elle a commencé sa carrière de journaliste à la Radio Nostalgie, devenue La Légende avant sa fermeture. A Nana Fm où elle a passé sept ans, elle fut reporter et animatrice culturelle. Sa voix douce et joyeuse a marqué les auditeurs. Voulant découvrir d’autres d’horizons et vivre d’autres expériences professionnelles, elle prit son envol et s’installa au pays des Hommes intègres. De secrétaire de rédaction de Planète Jeunes et Planètes Enfants, des magazines panafricains de jeunesse, elle est depuis un an la rédactrice en chef de Duc In Altum, un mensuel catholique de l’archidiocèse de Ouagadougou.

Elle, c’est Hortense Amée Dzifa Atifufu Alias Hada Hada. Son amour pour les cheveux naturels l’a conduit à se lancer depuis quelques années dans la fabrication des produits capillaires avec la gamme Hada’s Care. Nous avons rencontré cette afropreneure dévouée et toujours prête à donner des conseils capillaires et de bonnes astuces aux femmes, dans la bonne humeur.

Qui est Hada Hada ?

Hada Hada est une Africaine qui a décidé de porter ses cheveux naturels depuis 2011.

Qu’est-ce qui vous a motivé à vous lancer dans la fabrication des produits de soins pour cheveux crépus ?

Suite à ma coupe de cheveux à ras en 2011, j’ai constaté que les produits d’entretien conseillés par les bloggeuses africaines de la diaspora étaient des produits venus d’ailleurs et qui revenaient chers. A cela s’ajoutait le problème de qualité car la plupart des produits vendus en Afrique sont de moindre qualité. Alors, j’ai entamé mon entretien capillaire avec des produits disponibles à Ouagadougou, où je réside. Après mon shampooing, j’appliquais seulement ma crème à base de beurre de karité et d’huiles végétales. Je trouvais mes cheveux plus malléables pour les étirer au fil. Entre temps, j’ai fait la connaissance en 2014 de la communauté Fasonappy qui existe depuis 2013 sur Facebook. J’ai alors proposé cette crème aux femmes qui l’ont tout de suite adoptée ! Je me suis dit voilà l’occasion de proposer une gamme de produits naturels et locaux aux femmes désireuses de porter leur chevelure. Alors, j’ai lancé la marque Hada’s care.

Comment s’est fait le lancement de vos produits ?

La commande groupée de la communauté de Fasonappy en fin 2014 a été un test qui s’est avéré bien satisfaisant et motivant. J’avais le public cible qu’il me fallait et ce test m’a permis de mesurer les besoins capillaires. Grâce à cette communauté et aux facilités d’internet, je réalise que les demandes sont pareilles en Afrique et même dans notre diaspora. Il n’y a pas eu de lancement officiel avec une conférence de presse, mais la marque se fait connaître progressivement à travers des événements qui sont organisés.

Vous vivez au Burkina-Faso, où peut-on trouver les produits Hada’s care ?

Le domaine de l’entrepreneuriat est rude même si beaucoup de politiques encouragent l’esprit d’entreprise. Grace au digital, j’ai une entreprise ; j’ai une clientèle que j’ai obtenue grâce à mon marketing digital. Je saisis également des opportunités de ventes ponctuelles et de courte durée. C’est ainsi que Hada’s care a exposé ses produits pendant 10 mois de 2017 à 2018 dans un marché local à Ouagadougou. Nous avons encore conquis un autre marché bio pour 11 mois de 2018 à 2019. Nos commandes se font en ligne (par internet ou par téléphone) et nous avons un service de livraison pour satisfaire les clients. Pour notre clientèle hors du Burkina, nous exploitons le système routier de la région pour les livrer ; pour la diaspora, nous faisons encore confiance à la poste. Nous continuer de penser à d’autres stratégies de vente.

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Que propose la gamme Hada’s care à ses clients ?

Notre gamme est composée des huiles végétales, des beurres végétaux et de shampooing fait-maison. Nous proposons également des accessoires d’entretien capillaire comme le bonnet en plastique recyclé auquel on a associé le pagne; un accessoire qu’on est fière d’avoir conçu !. Il est utilisé pour les bains d’huiles. Nous proposons également un bonnet en satin qui, porté au coucher, évite la formation des nœuds et maintient l’hydratation des cheveux naturels africains. Nous avons par ailleurs remis au goût du jour le fil à tresser qui grâce à l’esprit créatif des coiffeuses réalise des coiffures époustouflantes ! Nous finirons par le vaporisateur qui est un peu l’accessoire indispensable d’une nappy. Ce récipient permet de pulvériser sur les cheveux une lotion hydratante préalablement préparée.

Quels sont vos produits phares ?

Les produits les plus demandés sont le glycériné de bissap qui est la base d’une lotion hydratante. On la conseille pour l’entretien quotidien de l’afro et des coiffures protectrices comme les twists ou les braids (où le cuir chevelu est accessible). Il y a la chantilly de beurre de karité qui est toujours appréciée pour son action hydratante. Nous en avons quatre variétés : aux huiles de baobab et de balanites ; à l’huile d’ail et de lait de vache ; aux poudres indiennes ; à la spiruline. Il y a le shampooing au savon noir naturel. Il débarrasse efficacement les cheveux de tous résidus et évite des démangeaisons du cuir chevelu. On oriente également les clientes vers d’autres produits en leur prouvant leurs propriétés capillaires.

Vous êtes très présente sur votre page facebook Hada’s care. Quelle information partagez-vous et quelle relation entretenez-vous avec vos internautes ?

Sur notre page, nous faisons beaucoup plus de sensibilisation et de conseil capillaires. Nous nous sommes dit que mobiliser les internautes autour de nos produits c’est bien mais ce n’est pas suffisant. Le port du cheveu naturel a besoin plus d’informations car c’est un changement de mentalité qu’il faut. Nous publions notre quotidien de nappy. Nous partageons des expériences capillaires réussies ailleurs comme des coiffures, des recettes, etc. Nous donnons aussi la parole à notre communauté pour s’exprimer sur ses réussites, ses échecs et ses prévisions. Nous faisons tout ce travail par du texte, des photos, des vidéos grâce à des applications.

Quelles sont vos ambitions pour les femmes noires ?

Je souhaite ouvrir un centre capillaire capable de diagnostiquer les problèmes des cheveux naturels africains, conseiller les femmes et mettre des produits naturels et locaux à la disposition des femmes noires. Par ailleurs, c’est aussi important de donner des formations à des coiffeuses sur la particularité du cheveu naturel africain donc ce centre pourra également servir de cadre de formation. Avec la mobilisation d’autres afropreneures, j’espère que les africaines seront plus fières de leur appartenance culturelle.

Quels sont les moyens dont vous disposez pour les réaliser ?

Je compte sur ma volonté, mon courage et mon investissement personnel. A cela s’ajoutent les différentes opportunités de formation entrepreneuriale et programmes de financement de Start up que je pourrai saisir afin de réaliser ce projet. Je compte aussi sur d’autres compétences pour la réalisation de ce projet. Comme on le dit, ensemble, on va plus loin.

Nous avons remarqué que vous réalisez à chaque fois des vidéos que vous partagez sur votre page facebook. Quels sont les messages que vous véhiculez dans ces vidéos ?

J’ai initié les vidéos sur la page pour deux raisons : montrer dans les détails l’entretien des cheveux naturels africains ; intéresser plus de femmes africaines où qu’elles résident. Nous avons aussi le style telling story en vidéo qui traduit aussi comment nous faisons du conseil capillaire en ligne et les types de demandes que nous recevons.

Depuis la création de la gamme Hada’care, quels sont les évènements auxquels vous avez participé ?

Nous participons aux rencontres annuelles de Fasonappy (communauté Facebook des nappy au Burkina), aux Nappies Days Ouaga, aux marchés promotionnels de produits naturels et locaux, aux formations sur le digital, aux formations sur l’entrepreneuriat et à des événements burkinabè sur la promotion de la femme…

Vous militez pour le retour aux cheveux naturels, pourquoi ?

Je choisis de porter mes cheveux naturels pour assumer ma nature que j’ai longtemps rejetée sans me l’avouer véritablement. Ce choix me met aussi à l’abri des effets nocifs du défrisage chimique. Je me suis rendu compte qu’au fil de mon parcours capillaire est née aussi une passion du cheveu africain.

Que pensez de l’argument selon lequel, le retour aux cheveux naturels est une tendance et qu’elle s’estompera avec le temps ?

Je respecte cet argument. Cependant, je voudrais faire remarquer qu’il y a essentiellement trois catégories de femmes qui portent les cheveux naturels africains : les fashion victims, celles qui ont le souci de leur santé et enfin celles qui en ont fait un choix politique. Parmi ces catégories, la plus fragile est celle de la mode parce que ces personnes n’ont pas une véritable raison. Par contre, la santé est l’un des fondamentaux du développement du capital humain d’un pays. Le défrisage cause des problèmes de santé chez les femmes africaines. A l’heure où les lobbyings militent pour la fin des inégalités dont sont victimes les femmes et où les compétences féminines sont encouragées, je pense que les cheveux naturels africains ont encore de belles décennies à vivre, sinon plus.

Avec le retour au naturel, le secteur des produits cosmétiques est en pleine ébullition. Les fabricants sont préoccupés par leurs chiffres d’affaires plutôt que de sensibiliser les femmes noires à aimer leurs cheveux. Qu’en pensez-vous ?

C’est un fait, seulement la masse de consommateurs que constituent les femmes africaines va très vite le leur faire savoir. On fait plus attention aux compositions des produits capillaires. Avec les réseaux sociaux, les mauvaises expériences avec un produit cosmétique sont vite répandues. Les femmes africaines se rendent aussi compte de beaucoup de produits soi-disant destinés au cheveu africain sont inadaptés. La tendance est aux produits confectionnés avec des matières premières issues de nos agricultures. La prise de conscience se fait et elle n’est qu’à ses débuts.

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Avez-vous des conseils à donner aux femmes qui hésitent encore à retourner au naturel ?

L’hésitation est due aux préjugés et à la méconnaissance. Ne gardez pas vos cheveux naturels par effet de mode. Faites-le au moins pour votre santé. Prenez votre temps surtout pour vous décider. Vous avez le choix entre une transition psychologique, une transition capillaire ou un big chop. La transition psychologique vous permet de vous préparer au choc que votre entourage aura probablement si vous choisissez de changer de chevelure ; trouvez la bonne raison de votre choix car d’elle dépendra votre capacité à résister à tous les commentaires bons ou mauvais que vous recevez ; informez-vous sur l’entretien de vos cheveux. Si vous vous sentez prête, vous avez le choix entre faire une transition capillaire ou un big chop. La transition capillaire consiste à laisser pousser à la racine progressivement vos cheveux naturels (en arrêtant bien sûr le défrisage). Vous apprendrez, au fur et à mesure que les cheveux défrisés se casseront, à entretenir les cheveux nouveaux à la base jusqu’à ne plus avoir les cheveux défrisés. Ou alors vous vous coupez les cheveux défrisés à ras et vous entamez votre parcours capillaire crépu. Il existe des communautés de femmes nappy un peu partout en Afrique et sur divers réseaux sociaux pour faciliter l’échange autour de l’entretien capillaire. Nous sommes aussi disposées à les conseiller.

Quels sont vos projets de Hada’s care pour les jours à venir ?

Nous travaillons à notre extension en Afrique et dans la diaspora. Nous envisageons plus de professionnalisation. Nous projetons aussi des évènements pour une meilleure sensibilisation autour des cheveux naturels africains et la promotion des produits naturels de nos terroirs.

Votre dernier mot ?

Nous promouvons certes notre patrimoine capillaire mais au-delà c’est la valorisation de nos richesses naturelles, le développement des économies communautaires et locales ; nous encourageons ainsi nos compétences agricoles et réduisons un tant soit peu le chômage. L’époque où l’Etat devait tout faire est révolue. Nous sommes depuis peu à l’ère de la participation individuelle. Je n’ai jamais imaginé être à la tête d’une entreprise, mais un besoin social l’a voulu. Croyons en nos capacités. Elles sauveront nos communautés. Je vous remercie.

Vous pouvez joindre Hada et Hada’s care aux adresses suivantes :

Facebook: Hada Hada (Page Personnelle)   ou Hada’s care (Page professionnelle)

E-mail: hadascare@gmail.com

Blog: https://hadascare.wordpress.com

Interview réalisée par Rita T.

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